Pantone a tranché : la couleur de l’année 2026 sera Cloud Dancer, un blanc mat, légèrement cassé, décrit comme « vaporeux », « aérien » et « silencieux ».
Un choix inédit dans l’histoire du Color of the Year — jamais un blanc n’avait été élu depuis 1999. Et surtout, un choix qui interroge : pourquoi, en 2026, consacrer… l’absence de couleur ?
Un blanc comme symptôme de l’époque
Depuis vingt-cinq ans, la couleur Pantone raconte plus le monde que la mode.
Après l’euphorie vibrante des teintes saturées des années 2010 et le refuge émotionnel du Very Peri ou du Peach Fuzz, Cloud Dancer incarne un virage net : un retrait, une respiration, une volonté de pause dans un environnement saturé visuellement.
Pantone évoque un besoin collectif de reset, un retour à la clarté, une sorte de page blanche pour sortir du bruit ambiant.
Dans un monde qui défile en flux continus — images, notifications, tensions politiques, crises climatiques — ce blanc s’impose comme une métaphore : avant d’ajouter quoi que ce soit, il faut retrouver un espace vide.
Le blanc comme outil, pas comme décor
Cloud Dancer n’est pas un blanc optique, clinique ou futuriste.
C’est un blanc adouci, presque textile, qui rappelle plus la poudre, le papier haut de gamme ou un reflet de lumière diffuse qu’un mur fraîchement repeint.
Pour le design graphique, cela ouvre un terrain intéressant :
- une base neutre qui met en avant les textures, les matières, les papiers ;
- un écrin discret pour des typographies plus affirmées ;
- un support idéal pour des contrastes sobres ou des compositions minimales.
Côté mode et décoration, ce blanc se positionne à l’opposé de la maximalisation colorée des dernières années. Il dessine un retour à l’essentiel, à l’épure, tout en évitant l’austérité du blanc pur.

Un choix qui agite le milieu créatif
Le débat est déjà intense.
Certains y voient une forme de lâcheté chromatique : après une décennie de crises, fallait-il vraiment choisir… du blanc ? D’autres y lisent une radicalité : celle de revaloriser le silence, l’espace vide, la respiration créative.
Le blanc a, évidemment, une symbolique complexe.
Il peut être perçu comme neutre, universel ; ou, au contraire, chargé d’une histoire sociale et culturelle qui n’a rien d’innocent. L’accueil mitigé de Cloud Dancer montre que la neutralité est une fiction, et qu’en design, le « blanc » n’est jamais qu’un choix parmi d’autres — un choix de contexte, de culture et de pouvoir.
Pourquoi ce blanc est moins sage qu’il n’y paraît
Cloud Dancer n’est pas un blanc « transparent ».
C’est un blanc qui demande du travail : il impose de penser l’espace, la matière, la lumière. Il se voit dans les ombres. Il révèle les défauts. Il oblige à composer, à doser, à choisir.
Ce n’est pas une couleur de facilité, mais une couleur de rigueur.

En ce sens, elle rejoint une tendance de fond :
- le retour au design silencieux,
- l’épuration assumée,
- la valorisation des formes plutôt que des effets,
- la montée en puissance d’un esthétique soft minimalism dans l’architecture, la tech, la communication.
À l’heure où tout semble crier plus fort pour se démarquer, Pantone retient l’attention avec une couleur… qui ne crie pas.
Cloud Dancer : une provocation à faible volume
Le plus intéressant dans ce choix, c’est peut-être son paradoxe.
Pantone opte pour une teinte quasi absente, mais qui invite à repenser les cadres, à questionner ce qu’on remplit — et pourquoi on le remplit.
Un blanc pour 2026, c’est un peu dire :
« Avant toute chose, faisons place nette. »
Le défi est désormais entre les mains des designers, artistes, graphistes, architectes et créateurs.
Que faire d’une année blanche ?
La réponse, comme toujours, ne viendra pas de Pantone, mais des studios.



